PV Radars - Contestation sur Internet : tout ce qu'il faut retenir de cette évolution
Ça y est, depuis une semaine, il est possible de contester une amende radar par Internet, et non plus seulement par courrier. Qu'est-ce que cela change pour les présumés contrevenants ? Est-ce vraiment gratuit ? La procédure est-elle vraiment simplifiée ? Que représente le volume de ce contentieux chaque année ? Caradisiac lève le voile sur ces statistiques, qui montrent que les usurpations de plaques sont en forte augmentation. Voici tout ce qu'il faut retenir de cette évolution.
Polémique, débat, nouvelle loi, Caradisiac clarifie la situation dans sa rubrique « Question de droit ». Avec la collaboration de Maitre Caroline Tichit, avocate spécialisée dans la défense des conducteurs.
Question de droit
«
Dans le cadre du plan de modernisation de l'administration et la volonté du gouvernement de simplifier les démarches des usagers, la contestation d'une contravention suite à une infraction relevée par un radar est désormais possible électroniquement », a annoncé la Sécurité routière le 23 novembre. Est-ce une véritable avancée pour les présumés contrevenants ?
La réponse de Caradisiac en bref
Certainement ! Il paraît évident que beaucoup vont préférer éviter de se rendre à La Poste et surtout éviter de payer l'envoi d'un courrier en recommandé avec avis de réception (4,72 €), et ainsi opter pour la contestation dématérialisée, via le site Internet de l'Antai, l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions qui gère pour le ministère de l'Intérieur ce système des radars automatiques. Le service, lancé la semaine dernière, est en outre gratuit alors qu'il avait été un temps annoncé payant.
Mais attention, si la procédure de contestation change sur la forme, elle reste sur le fond inchangée. Les mêmes règles sont à respecter. Et « les réclamations restent bien payantes dans un premier temps pour les propriétaires – ou leurs représentants légaux ou encore les locataires – des véhicules flashés qui contestent l'infraction ! », souligne Caroline Tichit. La consignation, du montant de l'amende forfaitaire (68 € pour les excès de moins de 20 km/h sur route et 135 € pour les autres excès et les feux rouges), reste à verser avant de pouvoir contester...
D'ailleurs, ceci expliquant certainement en partie cela, ces « vrais » contestataires sont loin de représenter la majorité des réclamations (voir notre tableau ci-dessous) reçues chaque année à Rennes, lesquelles sont de trois types :
Cas n°1 : le destinataire de l'avis conteste car il a vendu, cédé, volé, détruit son véhicule ou, fait encore plus fréquent apparemment, ses plaques d'immatriculation ont été usurpées.
Cas n°2 : il conteste car il avait prêté son véhicule à un autre conducteur qu'il accepte de dénoncer.
Cas n°3 : il conteste l'infraction, car il considère qu'il n'en est pas responsable. Cela peut-être par exemple parce qu'il ne conduisait pas au moment des faits, mais qu'il refuse de désigner celui qu'il pense être le véritable responsable. On peut considérer alors qu'il s'agit-là d'une « vraie » contestation. Une « vraie » contestation qui n'est recevable que si la consignation a bien été au préalable versée. Et la suite logique, c'est que ce contestataire se retrouve cité à comparaître devant le tribunal.
Pour finir, trois issues possibles pour ce Cas n°3 : le juge peut condamner le contestataire (sans parler d'éventuelles sanctions complémentaires, celui-ci écopera d'une amende, avec à la clé un retrait de point(s)) ou le juge peut le dispenser de peine (reconnu coupable, il n'est toutefois pas sanctionné, il n'a donc ni amende ni retrait) ou encore le juge peut le relaxer.
Il y a alors deux types de relaxe à la suite d'un PV radar : relaxe totale (pas d'amende, pas de retrait de point), relaxe assortie d'une amende – non pas pénale mais civile. C'est LA particularité du contrôle automatisé, et seuls les propriétaires, les représentants légaux des sociétés propriétaires et les locataires peuvent être ainsi déclarés « redevables pécuniaires », en vertu de l'article L121-3 du code de la Route. A noter que cette amende est généralement assez salée au tribunal, de l'ordre de 150-200 euros pour un excès de moins de 20 km/h. Toutefois, elle ne déclenche aucun retrait de point(s).
Si vous souhaitez approfondir le sujet...
La contestation des PV radars en chiffres (exclusif)
Chaque année, plus de deux millions de PV issus du contrôle automatisé sont contestés. L'an dernier, il y en a même eu un peu
plus de 2,6 millions, sur plus de 12,5 millions de contraventions radars, comme indiqué dans notre tableau ci-dessous. Mais pour l'essentiel, il s'agissait de Cas n°2, soit de désignations d'un autre conducteur (DAC). Ainsi, dans ce système des radars automatiques,
moins de 2 % de PV sont véritablement contestés (Cas n°3). Sans doute en raison de l'obligation de consigner la somme correspondant à l'amende forfaitaire avant de pouvoir accéder au juge. La possibilité de contester par Internet peut-il alors changer cette donne ? Cela semble peu probable puisque cette consignation reste justement requise...
Ce à quoi l'on peu s'attendre en revanche, c'est que l'essentiel des réclamations finissent par être transmises de cette nouvelle manière, via le Web. Au lancement de ce service la semaine dernière, sur les deux premières journées,
la Sécurité routière a comptabilisé 3 606 contestations en ligne : 1 810 le 24 novembre et 1 796 le 25 novembre, ce qui correspond en gros à 25 % des quotas journaliers. Mais on peut d'ores et déjà prédire que ce taux va s'amplifier.
Source : à partir des statistiques du ministère de l'Intérieur
A noter que parmi les différents chiffres récupérés (ci-dessus) au sujet de ces différents types de réclamations,
on ne peut qu'être saisi par l'augmentation des Cas n°1 (+ 53 %) enregistrée l'an dernier. Et ce, alors même que les contestations n'ont globalement pas aussi vite progressé (+ 8 %) que le nombre de contraventions envoyées (+ 12 %) ! Il faut dire que le contrôle automatisé, dans le cadre duquel les conducteurs fautifs ne sont jamais interpellés, ne permet pas, bien au contraire, de lutter efficacement contre cette mode des plaques usurpées.
Qu'est-ce qui change vraiment ?
La contestation en ligne est-elle une contestation simplifiée ?
Non. « Ce sont les modalités de transmission qui évoluent, pas la procédure en elle-même », insiste Me Tichit. Désormais, les présumés contrevenants ont simplement le choix entre :
adresser leur requête en exonération – soit le formulaire à remplir pour contester – en recommandé avec accusé de réception et
remplir ce formulaire en ligne puis l'envoyer de manière électronique via le site Internet de l'Antai.
« Bien sûr, pour beaucoup, la démarche va paraître facilitée », ajoute l'avocate, « c'est donc une avancée ».
Attention, si vous n'êtes pas dans le cas de figure où vous n'avez pas vendu votre véhicule (Cas n°1), ni ne l'avez prêté (Cas n°2), la contestation n'est accessible que si vous consignez le montant forfaitaire de l'amende reçue, comme déjà indiqué.
La contestation, pour rappel, doit également être motivée. Et « ce n'est pas parce que cela semble plus simple de procéder par Internet qu'il est judicieux de se montrer prolixe », recommande Me Tichit. « Le contestataire peut s'en tenir à 'Je conteste cet avis de contravention car je considère que je ne suis pas responsable de l'infraction qui m'est reprochée', sans dénoncer qui que ce soit, ni donner plus de détails.
Enfin, les délais restent également inchangés : ils demeurent de 45 jours à partir de la date indiquée sur l'avis de contravention quand il s'agit du PV initial, ou de 30 jours quand il s'agit d'une amende majorée.
La contestation en ligne coûte-t-elle moins cher ?
De fait, oui. En procédant par Internet, cela permet d'échapper à l'envoi en recommandé avec accusé de réception qui coûte 4,72 euros (à partir du moment où le poids du pli n'excède pas 20 g).
Ensuite, comme déjà évoqué, si les propriétaires contestent l'infraction, la consignation reste toujours et avant tout réclamée...
La contestation en ligne n'est-elle possible que pour les PV radars ?
En théorie, c'est loin d'être évident ! Et cette contestation dématérialisée pourrait être possible dans d'autres cas également. Selon les dispositions de l'arrêté du 22 octobre 2015 précisant les modalités des contestations dématérialisées, il s'agit en effet de toutes les infractions décrites à l'article L121-3 du code de la Route, pour lesquelles un propriétaire qui n'a jamais été arrêté reste « redevable pécuniaire », même quand il clame son innocence. Il suffit pour cela qu'un agent verbalisateur relève « au vol » – on dit aussi « à la volée » – son numéro d'immatriculation dans le cas des cinq infractions suivantes :
excès de vitesse,
franchissement de feux rouges,
non-respect des stops,
non-respect des distances de sécurité,
utilisation des vois de bus.
Pour ces cinq infractions, un propriétaire, qui conteste sans preuve de son innocence, ne peut échapper au paiement d'une amende (civile donc). Or, il n'est bien sûr pas si évident de pouvoir prouver que l'on n'y était pour rien : « Vous n'avez jamais été arrêté. Vous n'êtes au courant de rien, si ce n'est que vous venez de recevoir un PV. Au moment des faits, vous étiez pourtant à votre domicile en train de dormir, mais vous y étiez seul, sans témoin. Vous ne disposez donc pas de preuve en soi à rapporter au juge... Vous ne pourrez éviter d'être condamné à une amende. En revanche, maigre consolation, vous échapperez au retrait de point(s) », détaille Caroline Tichit.
Source Caradisiac